Quand il m'arrive de faire un solo(clairon) ,je m'autorise à le faire différement de ce qui est écrit, voire même d'avoir plusieurs versions différentes...
Pensez-vous qu'il faille respecter "à la lettre" la partoche, ou le solo au contraire est fait pour être interprété selon le musicien ?
Bonjour,
je ne vous connais mais tant pis, le sujet me paraît intéressant, aussi je vais vous donner mes impressions et parler un peu de mon expérience puisque le "SOLO" c'est quelque chose avec quoi je vis un peu tout le temps.
Tout d'abord avant d'être pro, j'ai joué en amateur évidemment et ce depuis l'âge de 8 ans à Romagnat tout d'abord.
A 11 ans, j'étais jeune soliste clairon puis trompette. Vous ne pouvez pas imaginer ce que moi et mon cousin (fils de sous-chef et de chef) nous sommes tapés comme solos à cette période très mode (Boléro, Minauderie, Pépita, Reine du muguet, Valse des manèges, Disco Mique, Tropical Trumpet, Madinina, Karukéra, ...).
Jeune étudiant au CNR, je commençais à jouer quelques pièces solistes avec piano puis avec orchestre avant de passer mon Prix à 15 ans. J'avais déjà jouer quelques Feux d'artifice royaux, Water Music, Gershwin, Carmen, Carl Orff, etc.
Je suis entré à l'Air à 17 ans et suis resté 4 ans second soliste aux côtés de JP Pakosz à la BF. Ne soyons pas hypocrites, je me tapais tout ce qu'il ne voulait pas jouer (impros dans Trumpet Riif en duo avec Ch. Gondot, les staccatos dans Loucky Louc, Fantaisie Provençale, .... et plus tard Lamentation la plupart du temps, jusqu'au Soir sur un Mont Juich que j'ai par la suite enregistré après son décès).
Je suis ensuite entré comme soliste à l'Harmonie et assume cette tâche depuis 14 ans.
Je vous passe tout le répertoire mais vous rappelle quelques standards (Les tableaux, le boléro, le concerto en Sol, les Pins de Rome, des Smith, John de Meij, Berstein, ....).
A côté de cela, j'ai joué Hummel avec Symphonique, Haydn, Arutunian, Faillenot, ... en tant que concertiste sans compter les nombreux concerts avec l'orchestre d'auvergne, Paris, Lyon ou Cannes.
Je crois savoir ce que c'est que de vivre la chaise de Soliste et ce qu'un chef peut attendre de vous puisque par ailleurs je dirige la BF de Chapdes depuis longtemps déjà et je connais ce rôle aussi avec mes jeunes (amateurs) qui donnent le meilleur d'eux-mêmes par amour de ce qu'ils font (je dirai entre parenthèses que pro ou non, l'engagement du musicien est le même quand il se présente au public et joue pour sa fierté mais aussi pour élever sa société).
Alors, à la question "faut-il respecter à la lettre la partition ?" je serai tenter de répondre OUI car c'est ce qu'il y a de plus dur à réaliser et il y a une grande satisfaction à tendre vers la perfection.
Maintenant, c'est aussi une histoire de plaisir, de concertation avec le chef, de réaction de la part de la formation, de répertoire et de COMPETENCES. Là aussi, il est question de trouver un équilibre dans ce que vous faîtes à tous et de définir votre place comme soliste dans une formation ou Devant une formation (ça peut faire l'objet d'un autre débat).
Mais mon avis premier est d'affirmer qu'il n'a rien de plus difficile que de jouer à la lettre toutes les valeurs d'un solo tel que La Marche Funèbre de Poutoire ou Sensation, de faire preuve de justesse, respecter le phrasé, etc. Et la technique de Claudine et Jean Claude, .... certaines pièces de la PN jouées par un dénommé Laurent BOURDON et bien d'autres excellents musiciens , etc, etc.
Il y a bien sûr des pièces jazzy qui permettent un peu de zèle ou de "gri-gris" mais je ne pense pas qu'il en était question dans le sujet.
Je ne parle pas des pièces modernes pour lesquelles je recommande la même démarche que le classique. Respect écriture. La plupart du temps, tout est dit dans le texte ou alors c'est que c'est raté ...
Désolé pour ce que je vais dire, mais je pense que ceux qui arrangent à leur sauce quelques traits en dehors, c'est souvent pour faciliter leur approche du solo et metre en valeur leur jeu. Je ne connais pas tout car je n'écoute pas beaucoup, et il y a peut-être des choses de bon goût, mais je crois sincèrement que la plupart du temps c'est une façon déguisée d'esquiver les difficultés d'un solo que de partir dans tous les sens. Je me réfère à certaines interprétations de Karukéra où pour palier à la difficulté du solo qui réside dans la longueur (résistance), le soutien, le son et la justesse, certains envoyaient des rythmes dans tous les sens (pour ne pas avoir à tenir les sons), écourtaient du coup les longueurs (fin de phrase), jouaient de l'écriture pour éviter les intervalles et jouer ainsi sur les rapports (justesse), ...
A la sortie, j'appelle ça de l'esbrouffe même si le tout passe bien à l'oreille du tout public.
Après, il reste à savoir ce que l'on cherche vraiment.
Je pense que tout ceci est respectable et qu'il faut recadrer peut-être tout ceci à l'échelle amateur. Mais si on veut avoir une discussion honnête, je vous dis que je ne suis pas favorable à cette approche du solo.
Enfin, il faut parler de Musicalité car la technique et certaines performances (c'est malheureusement souvent ce qui intéressent les amateurs, tant pis je suis obligé de le dire !) doivent être au service de la Musique. Et pour ne pas être trop long, face à cette phrase, que j'avoue avoir du mal à comprendre "ou le solo au contraire est fait pour être interprété selon le musicien ? je réponds : heureusement que le solo est fait pour être interprété. Il ne peut pas être autrement d'ailleurs. Et à chaque prestation, il le sera différemment.
Et j'ajoute, qu'on peut respecter à la lettre une partoche et interpréter tout de même un solo ! Heureusement, non, sinon j'ai rien compris et il faut que j'ouvre une épicerie !
Ah, il faut bien rire. Je suis sûr que ce n'est pas tout à fait ce qu'a voulu dire notre collègue qui s'interroge. J'attends ses réactions.
En ce qui concerne le chef, il a évidemment un rôle très important à jouer envers le soliste car il doit le mettre en confiance.
Un chef crispé va à son tour crisper son soliste (à moins qu'il soit très solide).
Par le passé, peu de chefs savaient gérer ceci. Ils te mettaient la pression souvent en te disant de mettre toutes tes tripes, d'appuyer pour que ça passe, te faisait peser tout le résultat du concert sur le dos. Tu t'arrachais (même t'esquinter) pour assurer la réussite de la prestation.
Aujourd'hui, avec la formation, les chefs sont plus aptes à cadrer leur potentiel (ne pas demander à un musicien l'infaisable non plus par rapport à ses moyens. La situation d'échec est ensuite lourde à gérer). Ils savent mieux conduire l'orchestre, accompagner le soliste et respirer avec lui.
On en revient aux compétences.
Par contre, quand un soliste est court, qu'il est usé, qu'il s'embrouille, qu'il passe à côté, ... que c'est le KO, le chef ne peut souvent rien si ce n'est vivre l'embarras, partager la souffrance puis la peine, et essayer seulement de raccourcir l'enfer car il n'y a rien de plus malheureux qu'un soliste qui s'affale ....
Mais qu'est-ce que c'est beau et judicieux de faire jouer de bons solistes dans une société. C'est payant.
Mais attention, c'est avant tout un travail d'ensemble. Et l'on ne peut pas s'abriter derrière seulement quelques artistes. Un orchestre c'est avant tout, l'unité.
Merci d'avoir eu la patience de tout lire.
Je sais, je suis long ....